Toute la journée
passent des milliers de gens, c'est la population d'Arras qu'on fait
évacuer à cause du bombardement. L'incendie, que nous apercevions
hier, c'est un faubourg, Saint Nicolas, et une fabrique de bougies
qui brûlent. Quelle tristesse dans ce long défilé d'émigrés, la
plus grosse partie se compose de femmes, des enfants et tous
emportant un baluchon, toute leur fortune. Ils s'en vont vers
Saint-Pol, et de là, seront dirigés sur un point inconnu de la
France. Pauvres gens, ils ont quitté leur pays en flammes et
beaucoup ne retrouveront que des ruines au retour.
Un incident de ces
instants tragiques s'est produit à 10 heures du matin sur la route à
10 mètres de moi. Une femme portant un nouveau né le fait baptiser
par un jeune prêtre qui la dépassait. C'est le quart de notre
cuisinier qui servit de bénitier. Voilà bien la guerre ! Et
chacun continue sa route. Je me rappellerai longtemps cette journée.
Un Taube(1)
est passé près de notre chantier, mais il était trop haut pour
pouvoir l'atteindre au fusil. Mais nos canons lui ont envoyé
quelques obus. Tout le jour on a transporté des blessés, car on a
fait évacuer les hôpitaux d'Arras, Marceuil, Etrain(2).
Les Allemands ont eu cette nuit un mouvement offensif, mais ont été
repoussés avec de fortes pertes.
Ce soir, on nous a
distribué des chemises, caleçons, cache-nez et dons des femmes de
France ; sur une étiquette je trouve le nom d'[Illisible].
Demain nous quittons Duisans à 6 heures 45 du matin. Bonsoir.
(1) Etrich-Rumpler
Taube, monoplan Allemand
(2) Étrun
Bundesarchiv, Bild 146-1972-003-64 / CC-BY-SA [CC-BY-SA-3.0-de], via Wikimedia Commons |
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