mercredi 22 octobre 2014

Jeudi 22 octobre 1914

Toute la journée passent des milliers de gens, c'est la population d'Arras qu'on fait évacuer à cause du bombardement. L'incendie, que nous apercevions hier, c'est un faubourg, Saint Nicolas, et une fabrique de bougies qui brûlent. Quelle tristesse dans ce long défilé d'émigrés, la plus grosse partie se compose de femmes, des enfants et tous emportant un baluchon, toute leur fortune. Ils s'en vont vers Saint-Pol, et de là, seront dirigés sur un point inconnu de la France. Pauvres gens, ils ont quitté leur pays en flammes et beaucoup ne retrouveront que des ruines au retour.

Un incident de ces instants tragiques s'est produit à 10 heures du matin sur la route à 10 mètres de moi. Une femme portant un nouveau né le fait baptiser par un jeune prêtre qui la dépassait. C'est le quart de notre cuisinier qui servit de bénitier. Voilà bien la guerre ! Et chacun continue sa route. Je me rappellerai longtemps cette journée.

Un Taube(1) est passé près de notre chantier, mais il était trop haut pour pouvoir l'atteindre au fusil. Mais nos canons lui ont envoyé quelques obus. Tout le jour on a transporté des blessés, car on a fait évacuer les hôpitaux d'Arras, Marceuil, Etrain(2). Les Allemands ont eu cette nuit un mouvement offensif, mais ont été repoussés avec de fortes pertes.

Ce soir, on nous a distribué des chemises, caleçons, cache-nez et dons des femmes de France ; sur une étiquette je trouve le nom d'[Illisible]. Demain nous quittons Duisans à 6 heures 45 du matin. Bonsoir.

(1) Etrich-Rumpler Taube, monoplan Allemand
(2) Étrun


Bundesarchiv Bild 146-1972-003-64, Flugzeug Rumpler-Taube nach dem Start
Bundesarchiv, Bild 146-1972-003-64 / CC-BY-SA [CC-BY-SA-3.0-de], via Wikimedia Commons

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