La journée de samedi à
été marquée par la mort d'un sapeur tué d'une balle à la tête.
C'est toujours aux premières lignes que cela arrive. Une bombe, en
éclatant, blesse aussi un sapeur et un territorial, mais ce n'est
pas très grave car ils se ramènent tout seuls. Ce matin vers 8
heures, dans une sape de tête, j'entends appeler, je m'approche et
vois encore un sapeur ensanglanté ; c'est une balle qui vient
de le traverser, probablement au cœur, car il n'a pas poussé un
soupir et est mort aussitôt après. Détail plus navrant et ce dont
je me suis rendu compte une heure après, ce sont les français qui
l'ont tué, croyant tirer sur les Allemands. D'ailleurs il n'aurait
pu être touché du côté ennemi, un fort parapet étant de ce côté.
C'est ce qui prouve que la moitié du temps, les veilleurs ne savent
pas exactement où sont les tranchées ennemies et tirent sur les
leurs. Et ce n'est pas la première fois que cela arrive et
malheureusement pas la dernière.
Celui qui a été
frappé de cette mort, c'est son camarade qui était à côté de lui
et qui s'était engagé pour faire la guerre avec lui, et il a dû
éprouver une forte secousse en voyant tomber son ami, aussi le
pauvre garçon en pleurait.
À une heure, le, ou
plutôt les canons, se sont mis à vomir du feu, et pendant une heure
durant, on peut dire que cela a été un grondement de tonnerre
ininterrompu. C'était sur notre gauche et probablement une attaque
qu'elle préparait sur Saint-Éloi. Si les Allemands n'ont pas quitté
leurs tranchées avec la ferraille qui a dû tomber, c'est qu'ils y
sont vissés, car s'ils ne s'en vont ils doivent devenir fous. Tout
calibre devait donner 75, 90, 105, 120, 155. On aurait cru la fin du
monde. On a essuyé en première ligne quelques obus venant des
Allemands, et ils ont fait aussi marcher les mitrailleuses. En
croyant qu'on voulait les attaquer mais tout s'est borné à une
fusillade. Ce soir on me dit que le village de Carency est à nous.
C'est près de Saint-Éloi. Je saurai demain plus exactement ce qu'il
en est.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire