J'ai dormi comme un
morceau de bois et me réveille à 7 heures et demi, le sommeil
dissipé mais fatigué. De toute la journée je ne fais pas 500
mètres. Je profite pour faire ma correspondance le soir, car j'ai
reçu 7 lettres à la fois, et il faut que j'y réponde. Le manque de
temps a mis du retard dans mon courrier.
Dans la ferme où nous
sommes, et ma foi l'on est bien tombé pour une fois, car nous avons
table pour écrire et un fourneau qui ronfle, et le patron, un
cultivateur nous tend du café chaud et la goutte à bon compte, tout
le monde est content. Les deux sergents qui sont avec moi, avons une
pièce à côté, où un cuisinier de zouave nous a dit de nous
mettre, et sommes comme chez nous et y couchons sur un matelas étalé
par terre. Quel lit de plume comparé à la litière que l'on a eue
jusqu'à présent. Quand le cuisinier a servi ses chefs, un adjudant,
un maréchal des logis des chasseurs d'Afrique, et deux autres, on se
fait cuire des plats et on se rattrape des jours où l'on n'avait pas
de patates. Ici on en a dans le champ en face. Nous avons pu ainsi
augmenter notre ordinaire car en ce moment la cuisine n'est pas
merveilleuse à la section.
Le soir on a fumé
quelques cigarettes, et en faisant les lettres, le patron m'a payé
le café et ensuite le thé. C'est le premier que nous trouvons aussi
aimable, car le genre du nord est d'être froid et peu communicatif.
Mais il se trouve que mon proprio a resté longtemps à Paris, et
peut-être est-ce pour cela qu'il est plus sociable. Il nous a aussi
vendu du vin à 2 Fr le litre, on le trouve cher mais c'est du vieux
et excellent. J'ai remarqué que dans le nord tous les vins sont en
bouteilles et qu'ils sont de qualité supérieure, quoique ce ne soit
pas leur boisson courante, ils aiment le bon et leur cave est en
rapport. Je me couche à 10 heures du soir.
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